Conformément aux principes généraux de l'enseignement
de l'éducation civique,
juridique et sociale publiés avec le programme de la classe
de seconde, l'ECJS a pour
objet en classe de première le sens du politique. Il ne
s'agit pas d'enseigner la science
politique, mais de susciter chez les élèves des
questions et une réflexion qui leur
permettent de mieux comprendre comment fonctionne la vie politique
des sociétés
contemporaines. Cet enseignement mobilise à la fois les
notions acquises au collège,
des savoirs enseignés dans différentes matières
et les acquis de l'éducation civique,
juridique et sociale de la classe de seconde. Il s'efforce d'apporter
une meilleure
compréhension de la fonction du droit, des institutions
politiques et de l'action
des citoyens dans la communauté politique.
Au terme de la classe de seconde, les élèves se
sont approprié la notion de citoyenneté.
La classe de première est consacrée à la
réflexion sur la participation politique
et l'exercice de la citoyenneté. Les institutions politiques
qui organisent la
République et la démocratie sont analysées
à partir de leur refondation constante
par les pratiques des citoyens. Cette réflexion permet
de comprendre le sens du
droit, des institutions et des libertés politiques. Elle
s'exerce à travers la compréhension
critique de ces institutions et des tensions qui traversent toute
société démocratique.
Dans notre régime politique, celui de la démocratie
représentative, la participation
politique prend essentiellement la forme de l'élection
de représentants du peuple,
mais aussi d'autres formes : participation au débat public,
actions collectives... Le
principe de la représentation apparaît comme le fondement
de la légitimité dans
toute société moderne et peut être ainsi un
moyen d'aborder les grands problèmes
politiques contemporains. Il est généralement invoqué
pour légitimer les institutions
politiques qui représentent le corps de la nation, mais
on peut aussi le mobiliser à
propos d'autres relations sociales : les partis qui représentent
les courants de pensée,
les syndicats qui représentent les intérêts
de leurs adhérents et de leurs mandants, la
justice qui est rendue au nom du peuple français. Ce principe
de représentation est
aussi présent dans les associations, comme dans les lycées
(avec les représentants des
professeurs, des élèves, des parents d'élèves,
des collectivités territoriales...).
Ainsi, le fait politique peut être abordé à
travers l'idée de représentation. Dans tous
les domaines qu'elle structure Assemblée Nationale,
partis, syndicats, associations,
lycées... la représentation crée une
mise à distance entre représentants et
représentés tout en les mettant en relation. Ces
deux mouvements produisent, selon
les époques et à des rythmes variables, des tensions
continues, inévitables dans les
sociétés démocratiques : tensions entre les
différentes institutions, entre ces institutions
et le monde vécu par les citoyens.
Ces tensions, source de conflits inévitables, sont constitutives
du sens moderne du
politique. On pourra les analyser en montrant que les sociétés
démocratiques s'efforcent
de les gérer par des pratiques politiques qui sont conformes
aux principes
du droit et excluent le recours à la violence.
Afin de limiter le risque d'une trop grande dispersion, quatre
thèmes sont proposés
en classe de première. Ce sont :
- Exercice de la citoyenneté, représentation et
légitimité du pouvoir politique
- Exercice de la citoyenneté, formes de participation politique
et d'actions collectives
- Exercice de la citoyenneté, République et particularismes
- Exercice de la citoyenneté et devoirs du citoyen
On prendra au choix, en les reliant éventuellement, un
ou plusieurs de ces quatre
thèmes qui ne sont pas énoncés dans un ordre
contraignant, pour éclairer le sens de
la participation politique. Dans le cadre de la philosophie générale
de l'ECJS, et conformément
à la loi du 28 octobre 1997, l'étude du devoir de
défense sera abordée
quels que soient le ou les thèmes choisis. Le même
thème peut être utilisé de plusieurs
manières. Au fil du temps, les illustrations choisies pourront
se périmer ou
s'enrichir de matériaux fournis par l'actualité
ainsi que des pratiques et innovations
des professeurs.
À partir du travail sur l'un ou plusieurs de ces thèmes,
les sept notions suivantes doivent
être abordées et avoir reçu une première
définition :
- Pouvoir
- Représentation
- Légitimité
- État de droit
- République
- Démocratie
- Défense
Ces notions, mises en relation, permettent de comprendre le sens
de la participation
politique et de l'exercice de la citoyenneté.
La démarche proposée mobilise notamment des savoirs
issus de différentes disciplines
et de leurs pratiques. Le choix des sujets étudiés
pour déboucher sur l'analyse
des notions du programme relève de la liberté pédagogique
des professeurs. Ils l'adaptent
en fonction de la filière dans laquelle ils interviennent,
des compétences particulières
existant à l'intérieur de l'établissement
et des possibilités d'interventions
extérieures. Cette réflexion sur l'exercice politique
de la citoyenneté ne peut se concevoir
ici qu'à partir des intérêts manifestés
par les élèves et de leurs interrogations.
L'actualité notamment, qu'elle soit locale, nationale,
européenne ou internationale,
peut fournir le ou les sujets se rapportant aux pratiques de la
citoyenneté et au fonctionnement
des institutions. On fera le lien entre des événements
de l'actualité et une
réflexion plus large. Élections en France ou à
l'étranger, commémorations des grandes
lois de la République ou de grands conflits du passé,
débats de société pourront
ainsi être mobilisés dans la mesure où ils
permettent de montrer aux élèves les conséquences
directes de l'exercice de la citoyenneté.
Il conviendra de relier les questions posées par l'actualité
aux enseignements que
nous fournit l'histoire. On peut se référer aux
conseils méthodologiques donnés
dans le programme de la classe de seconde.
Parmi les méthodes pédagogiques mobilisables pour
cet enseignement, il y a lieu de
privilégier l'organisation de débats argumentés.
Ils contribuent à créer un espace de
discussion au lycée permettant de comprendre le sens et
les règles de la participation
politique. Un débat argumenté est un débat
préparé. Cela suppose le recours à des
ressources documentaires appelant une utilisation méthodique
du CDI.
L'organisation du travail préparatoire au débat
peut mobiliser des techniques variées
selon le sujet abordé : ouvrages, dossiers de presse, recherche
de documents
historiques, politiques ou juridiques, y compris sur cédérom
ou sur l'Internet,
enquêtes, etc., en visant à former l'esprit critique
des élèves face aux résultats de ces
recherches.
L'évaluation en classe découle de cette démarche
: la pédagogie mise en oeuvre a fait
appel à la mobilisation de l'élève dans des
activités diverses écrites et orales de
recherche et d'exposition, qui doivent toutes être prises
en compte. Le professeur
évalue les productions des élèves sous leurs
différentes formes : constitution de dossiers,
contenu des interventions dans les débats, textes écrits,
etc.
Si toute société est caractérisée
par l'existence de relations de pouvoir, on peut s'interroger
sur la spécificité du pouvoir politique. Il peut
être défini par sa légitimité,
c'est-à-dire par une acceptation fondée sur le consentement
des membres de la société.
La légitimité repose sur des principes et des pratiques
qui ont varié dans le
temps et dans l'espace. Dans les sociétés démocratiques
contemporaines, elle repose
essentiellement sur la légalité qui fonde l'État
de droit.
L'analyse des modes d'attribution et d'exercice du pouvoir pourra
être approfondie.
Contrairement aux régimes totalitaires, les démocraties
représentatives constituent
une organisation du pouvoir politique dont la légitimité
passe par la reconnaissance
de la souveraineté populaire et dont l'exercice repose
sur la délégation de cette
souveraineté. Les débats de la Révolution
ont montré l'opposition entre les tenants
de la démocratie directe et ceux de la démocratie
représentative des sociétés démocratiques
modernes. Le peuple délègue sa souveraineté
par le biais d'élections régulières
et concurrentielles à des élus chargés, pour
un temps et sous des formes
déterminées par la loi, de s'occuper des affaires
publiques.
En ce sens, la représentation politique désigne
le processus par lequel des gouvernants
sont légitimés par l'élection pour parler
au nom du peuple et habilités à décider
en son nom. L'interrogation sur les formes de la représentation
politique et les
problèmes qu'elle rencontre peut servir de point de départ
à la réflexion.
Celle-ci mérite enfin d'être enrichie par l'analyse
d'un ensemble de concepts : pouvoir,
domination, autorité, violence, et leur mise en relation
à travers des faits précis.
Il est en effet recommandé d'étudier ce thème
en partant d'un exemple.
Le citoyen se définit par l'exercice de la souveraineté
politique dans la Cité à laquelle
il appartient. L'exercice de la citoyenneté ne saurait
donc se réduire ni à la possession
de droits fondamentaux, ni à l'exercice du droit électoral
: il implique la
prise en compte de toutes les formes de la participation politique.
La démocratie se
définit comme le gouvernement du peuple, par le peuple
et pour le peuple ; cela
exclut le pouvoir d'une autorité qui ne tirerait pas sa
légitimité du peuple mais d'une
source extérieure ou réputée supérieure.
La démocratie implique donc la participation
active des citoyens.
Celle-ci concerne autant la participation au débat public
censé éclairer les décisions
collectives que la prise de ces décisions elle-même.
Elle peut donc prendre différentes
formes. Le thème précédent met en évidence
l'importance dans une démocratie
de la participation au processus de désignation de représentants
élus. Celui-ci insiste
sur les autres dimensions :
- la participation à l'espace du débat public où
se forme l'opinion publique, ce qui
implique l'analyse critique des moyens de communication de masse
et de leurs effets
(y compris de l'Internet, des forums et du courrier électronique)
;
- la participation aux associations civiles, sociales et politiques,
notamment à l'échelon
local ;
- la participation à des groupes défendant des intérêts,
par exemple les syndicats ;
- la participation à des actions collectives, locales ou
nationales, sur des objectifs
sociaux ou civiques.
Il ne s'agit pas bien sûr d'étudier toutes les formes
de participation politique et d'actions
collectives mais d'en choisir une manifestation qui puisse à
la fois faire sens et
susciter l'intérêt des élèves. On pourra
ainsi mettre en évidence l'importance de la
participation politique non électorale dans la formation
du lien politique qui rassemble
la Cité.
Toute société politique est diverse. Elle réunit,
par définition, des populations dont
les origines historiques, les convictions religieuses et les conditions
sociales sont différentes.
La République reconnaît aujourd'hui ces particularismes
et organise leur
gestion. La citoyenneté n'implique pas que les individus
abandonnent leur identité
propre ou leur volonté d'affirmer leur fidélité
à un passé historique particulier et à
des croyances religieuses personnelles. Tout au contraire, elle
garantit que ces manifestations
peuvent se faire librement, à condition que soient respectées
les lois qui
organisent les libertés publiques.
Toutefois, le respect des particularismes ne comporte-t-il pas
inévitablement des
limites ? Pour que la République puisse être le bien
de tous, deux exigences se sont
imposées :
- la séparation de l'ordre politique et de l'ordre religieux,
qui se manifeste en France
à travers les lois de la laïcité ; elle permet
d'organiser la vie en commun de ceux qui
ont des pratiques et des croyances religieuses différentes
;
- la garantie de l'égale dignité de toutes les personnes,
qui est au coeur des valeurs
communes définissant la citoyenneté. Les pratiques
culturelles, par exemple dans le
droit personnel, ne sauraient être contradictoires avec
l'égale dignité de tous les êtres
humains.
Les particularismes ne peuvent être reconnus que s'ils sont
compatibles avec les
valeurs de l'égalité et de la liberté des
individus qui légitiment l'exercice de la citoyenneté
et le projet politique de la République.
Si l'État républicain garantit les libertés
individuelles et les droits du citoyen, les
devoirs du citoyen sont la contrepartie et la condition de ces
droits. Toutefois, l'État
semble exercer une pression dont le citoyen prétend parfois
s'affranchir (fraudes,
désobéissance à la loi, incivisme, dégradation
des biens publics, destruction de la
propriété collective). Il importe donc de montrer
en quoi le respect de la loi et de ses
devoirs par le citoyen n'est pas un conditionnement à l'obéissance
; c'est, tout au
contraire, son choix libre et raisonné d'institutions sans
lesquelles les libertés, les
droits et la sécurité ne pourraient exister.
On pourra alors analyser les devoirs fondamentaux du citoyen :
le devoir électoral,
le devoir fiscal, le devoir de défense, le devoir de solidarité.
Ces devoirs, qui ont conduit
à une extension de l'intervention de l'Etat dans les différentes
sphères de la vie
sociale, suscitent des interrogations nouvelles sur les relations
entre les contraintes
collectives et les libertés des individus.
Le devoir de défense, depuis la suspension de la conscription
et l'instauration de
l'Appel de préparation à la défense (APD),
ainsi que la mise en place du parcours
citoyen, exigent que l'école soit partie prenante d'une
réflexion critique sur les moyens
de préserver les valeurs de civilisation et de liberté
fondatrices de notre démocratie,
sur la sécurité collective des citoyens, sur le
devoir d'ingérence lorsque les
droits de l'homme ou le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes
sont outrageusement
bafoués, sur les engagements humanitaires, et tout particulièrement
sur le rôle
et l'usage des forces armées dans ces contextes.