I/ La construction de la démocratie républicaine en France de de 1848 à nos jours

Vocabulaire : souveraineté nationale, citoyenneté et suffrage universel, libertés fondamentales, pluralisme politique, séparation des pouvoirs
Introduction
De 1848 à nos jours, la France a connu 6 régimes politiques :
De 1848 à 1852, c'est la Seconde République, elle ne dure que 4 ans.
De 1852 à 1870, c'est le Second Empire qui s'achève par une défaite contre la Prusse
De 1870 à 1940, c'est la III° République qui pose les bases de notre démocratie politique et survit à plusieurs crises
De 1940 à 1944, c'est la dictature de Vichy à la faveur de la seconde guerre mondiale
De 1944 à 1958, c'est le retour de la démocratie et la IVème République, qui chute à cause des guerres coloniales
De 1958 à nos jours, c'est la Vème République
Au cours de ces 150 ans, la construction de la démocratie, à travers révolutions et votes, n'a pas été facile, elle a connu des avancées et des reculs ; des droits politiques mais aussi économiques et sociaux ont été acquis au cours de cette période.
1/ 1848-1879 : le difficile établissement de la République

A/ Espoirs et échecs de la deuxième République (1848-1852)
1848 : 2 révolutions : février : une révolution républicaine chasse le roi Louis-Philippe du pouvoir, instaurant la démocratie politique (suffrage universel masculin), proclamant la république (2 p 8) ; rêve de fraternité (abolition de l'esclavage, droit au travail pour tous) ; juin : échec d'une révolution sociale après la fermeture des ateliers nationaux ; réaction conservatrice (droit de vote réduit pour les pauvres qui n'ont pas de domicile fixe). Election de Louis Napoléon Bonaparte comme président de la république au suffrage universel direct (les électeurs ne sont pas encore mûrs pour la république !) ; coup d'état de LNB le 2/12/1851, puis proclamation de l'Empire

B/ Le second Empire (1852-1870) : l'apparence démocratique d'un régime autoritaire
Apparence démocratique (suffrage universel, élections pluralistes), réalités autoritaires (élections manipulées par la " candidature officielle " (3 p 9), plébiscites ne laissant pas un vrai choix aux électeurs car réponse par oui ou non sur question choisie par le pouvoir, pas de séparation des pouvoirs. Malgré évolution plus démocratique à la fin (droit de grève en 1864, droit pour les députés de proposer des lois, liberté de la presse), on peut parler de césarisme démocratique (pouvoir absolu imposé par la force mais s'appuyant sur le vote populaire). Chute du 2nd Empire après défaite contre la Prusse de 1870.

C/ La difficile naissance de la troisième République (1870-1879)
- Naissance en plein drame : défaite militaire contre la Prusse, révolution à paris proclamant la république en septembre 1870, occupation militaire d'une partie de la France par les Prussiens (puis allemands) ; guerre civile entre le gouvernement élu en février 1871, à majorité monarchiste, qui s'installe à Versailles sous la présidence de Thiers et négocie la paix, et la Commune de Paris, à majorité républicaine et socialiste, qui veut continuer la guerre patriotique et créer une république sociale : défaite sanglante de la Commune lors de la " semaine sanglante " (mai 1971, 20 à 30 000 morts).
- La république survit malgré une majorité monarchiste au pouvoir : les deux prétendants au trône ne s'entendent pas, et les monarchistes élisent en 1873 le pdt Mac Mahon, monarchiste convaincu, avec un mandat de 7 ans pour gagner du temps en attendant un accord permettant le retour à la monarchie. Mais les républicains gagnent du terrain aux élections législatives (1876 : nomination d'un gouv. républicain) et sénatoriales (1979 : démission de Mac Mahon).
- Ainsi, la république s'est imposée dans les années 1870 en combattant la gauche ouvrière et la droite monarchiste et bonapartiste, et en adoptant à partir de 1875 des lois constitutionnelles créant un régime parlementaire.
2/ 1880-1944 Triomphe et crise du modèle Républicain

A/ Le modèle républicain sous la troisième République
- Un régime parlementaire : La chambre des députés élue au suffrage universel en est l'organe essentiel. Elle dispose du pouvoir législatif et participe avec le Sénat à l'élection du Président de la république. En cas de désaccord avec le gouvernement dirigé par le président du conseil, elle peut le renverser. Le président, qui s'abstient de dissoudre l'assemblée pour ne pas rappeler le coup d'état de Napoléon III, a peu de pouvoir. Le législatif a plus de pouvoir que l'exécutif (5 p 9). Ce régime parlementaire va durer jusqu'en 1940.
- Adoption des symboles républicains : En 1879, la Marseillaise devient hymne national. En 1880, le 14 juillet devient notre fête nationale. Durant ces années, on encourage les communes à bâtir des mairies où l'on trouve le buste de Marianne, le drapeau bleu blanc rouge ainsi que la devise " liberté, égalité, fraternité ".
- La IIIème république élargit les libertés civiles et politiques (3 p 16): liberté de la presse, élection des conseils municipaux qui désignent le maire (avant ils étaient nommés par les préfets), divorce autorisé, loi de 1901 autorisant les associations, renforce la démocratie et permet la naissance des partis politiques modernes.
- Elle rend l'école primaire gratuite, laïque et obligatoire et sépare l'église de l'Etat. Sous l'action de Jules Ferry l'école devient gratuite, laïque et obligatoire en 1881-1882. L'obligation et la gratuité font de l'école un outil d'égalité des chances. La laïcité est une garantie de liberté de conscience ; l'école n'a plus pour but d'enseigner des croyances mais des connaissances. Sa finalité est de former un citoyen instruit de ses droits et ses devoirs, un républicain capable de penser par lui-même. L'influence de l'école laïque contrebalance celle de l'Eglise qui à l'époque combat la République. Pour renforcer l'esprit laïque, la loi de 1905 (4 p 11) sépare l'église et l'Etat. La croyance religieuse devient une affaire strictement privée et personnelle. La république devient laïque. Laïcité : doctrine qui souhaite la séparation de l'église et de l'Etat et qui refuse tout enseignement d'une croyance religieuse à l'école.

B/ Limites et crises du modèle républicain

Mais ce modèle républicain connaît des limites (démocratie incomplète en raison d'inégalités politiques maintenues), et doit faire face à des crises profondes.
Limites :
- Colonialisme et droits de l'Homme : avec Jules Ferry et ses successeurs, la république poursuit la politique de conquêtes coloniales commencée sous la monarchie et le Second Empire ; malgré l'abolition de l'esclavage en 1848, les droits de l'Homme ne sont pas appliqués dans les colonies : le code de l'indigénat fait des indigènes des sujets soumis à des lois injustes et non des citoyens libres et égaux (cf. film " indigènes " ). Mais bien peu de français s'indignent de cette injustice.
- Suffrage universel masculin : 6 lois reconnaissant le droit de vote des femmes votées entre 1919 et 1936 par la Chambre des députés sont refusées par le sénat.
Grandes crises :
- affaire Dreyfus (3 p 11): de 1894 à 1906, cette affaire divise les français. C'est d'abord une erreur judiciaire dans une affaire d'espionnage ; l'affaire devient politique lorsque l'armée refuse, malgré les preuves, d'innocenter Dreyfus, pour ne pas reconnaître son erreur, et lorsque l'écrivain Emile Zola prend parti pour Dreyfus en écrivant l'article " J'ACCUSE " en 1898. Les français se divisent en dreyfusards (partisans de Dreyfus au nom de la justice, des droits de l'Homme, regroupant, à gauche, républicains, laïques, socialistes) et antidreyfusards (refusant qu'on touche à l' " honneur " de l'armée, regroupant, à droite, nationalistes, catholiques, antisémites, royalistes). La victoire des dreyfusards consacre le triomphe du modèle républicain (Droits de l'Homme, laïcité)
- 1ère Guerre Mondiale : de 1914 à 1918, 900 morts par jour ! Malgré le poids énorme des pertes et des destructions, le régime républicains survit, preuve de son enracinement.
- du 6 février 34 au Front populaire : dans les années 30, la république paraît menacée par la crise économique et la montée de l'extrême droite, incarnée par les ligues (4 p 12)(cf. manifestation du 6 février 34), dans un contexte de triomphe européen du fascisme. Mais le Front Populaire, réunissant face à ce danger le centre et la gauche (radicaux, socialistes, communistes), triomphe aux élections de 1936 et porte au pouvoir le socialiste Léon Blum, qui fait voter des réformes sociales (congés payés, semaine de 40 h).

C/ 1940 - 1944 : l'Etat français

Durant la seconde guerre mondiale, la République et la démocratie sont bafouées.

- de la défaite au régime pétainiste : mai-juin 1940 : effondrement militaire de la France face à l'invasion nazie. Face à la défaite, le général De Gaulle prône la poursuite de la lutte et la résistance (appel du 18 juin) mais le maréchal Pétain, un des vainqueurs de 14-18, nommé président du conseil le 17juin 1940, demande le jour même l'armistice, signé quelques jours plus tard. Dans un climat de panique, il obtient le 10 juillet 1940 le vote des pleins pouvoirs par le Parlement. Installé à Vichy en zone sud (non-occupée), il promulgue alors des lois mettant fin à la République et instaurant une dictature qui prend le nom d' " État Français ".

- L'État français, régime légal de la France pendant la seconde guerre mondiale, est …


o un régime réactionnaire, conservateur, anti-républicain et anti-démocratique. Les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire sont entre le mains de Pétain, comme dans toute dictature (6 p 13) ; Pétain fait l'objet d'un culte de la personnalité. Il met en place une " révolution nationale " (5 p 13) qui nie les valeurs de la république (il n'y a plus d'élections ni de Parlement ; " travail, famille, patrie " remplace " liberté, égalité, fraternité " ; le cléricalisme remplace la laïcité ; les libertés fondamentales sont bafouées : expression, presse, suppression des partis politiques et des syndicats). La Milice pourchasse les résistants et les juifs.
o un régime raciste, xénophobe, antisémite : les juifs sont exclus de la fonction publique par le " statut des juifs " (7 p 13), puis livrés avec l'aide de la police française à l'Allemagne qui les déporte dans les camps d'extermination.
o un régime qui collabore avec l'Allemagne nazie, à partir de l'entrevue de Montoire (octobre 1940) : en échange de son soutien à l'effort de guerre nazi, Pétain espère un sort moins dur pour la France après la victoire nazie, et veut en profiter pour mener à terme sa " révolution nationale ". Les français sont envoyés travailler en Allemagne (STO : service du travail obligatoire). La Milice pourchasse les résistants et les juifs.

- L'idéal républicain et démocratique est incarné par les résistants, qui poursuivent la lutte dans l'illégalité, sous la direction de De Gaulle et Jean Moulin. Les mouvements de résistance regroupent des communistes, des socialistes, des républicains patriotes de toutes tendances. Après les débarquements en Normandie et en Provence, puis la libération de Paris, combats auxquels participent les forces de la France Libre et des FFI, De Gaulle installe le 25 août 1944 à Paris le gouvernement provisoire de la république française. La démocratie et la république sont rétablies et renforcées (droit de vote pour les femmes en 1944).