Pour écouter
les interviews de quelques habitants et responsables de Sollacaro,
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Sollacaro se trouve en Corse du sud,
dans la basse vallée d'un
fleuve côtier, le Taravo (Taravu en corse).
La commune de Sollacaro est composée de deux entités
: Sollacaro (450 m d'altitude) et, en contrebas, le hameau de
Calvese. La commune
s'étend jusqu'à la vallée du Taravo.
Les deux villages ont été réunis en une seule
commune en 1853. Ils appartenaient autrefois à la pieve d'Istria.
La situation du village est représentative de l'implantation de l'habitat corse : en hauteur, à l'écart des dangers de la mer.
Comme
toutes les communes de Corse, Sollacaro est signalé par
son nom corse (Suddacaro) et français. Ce bilinguisme témoigne
de la vitalité de la langue et de la culture corse : malgré
plus de deux siècles de centralisation française,
malgré la faible population de l'île, celles-ci ont
résisté. Depuis les mouvements autonomistes et nationalistes
apparus au cours des années 70, la reconnaissance de la
culture corse et de sa spécificité a progressé.
La langue corse est enseignée dans les écoles élémentaires,
les lycées, l'université, et la création
culturelle connaît un remarquable dynamisme.
200 à 230 habitants
en hiver, 1000 en été : ces deux chiffres montrent
bien le problème démographique
et économique de la commune.
Comme toute la Corse, Sollacaro a été saignée
par la première guerre mondiale (10% de la population corse
a disparu à la guerre). Cette saignée, renforcée
par des pertes plus importantes qu'ailleurs au cours dela seconde
guerre mondiale, a marqué la fin de l'économie traditionnelle
corse, agro-pastorale et largement autarcique. Ce déclin
économique a entraîné un vaste mouvement d'émigration,
sur le continent ou dans les colonies, ainsi qu'une concentration
de la population insulaire dans les grandes villes, notamment
Ajaccio. L'été, le village se peuple de corses du
continent, de résidents ajacciens, de touristes ; l'hiver,
il ne reste qu'une population réduite, avec peu d'actifs,
et une majorité de retraités : la Corse est la région
française dont la population est la plus vieille. La densité
de population de la Corse intérieure est la plus faible
de France (7 habitants au km²). Comment lutter contre le
déclin démographique et économique ? C'est
le défi majeur auquel ont a faire face les sollacarais,
comme l'ensemble de la Corse.
Pour en savoir plus sur la démographie, voir les résultats
du recensement de 1999.
Le village est dominé par la masse
imposante de la maison forte construite au XVIème siècle
par la famille Colonna D'Istria. Cette famille est toujours propriétaire
du château. Les D'Istria,
une des principales familles nobles de Corse, dominèrent
la Corse au début du XVème siècle.
La permanence
des familles de notables est un des traits de la Corse, qui
se marque, dans le paysage, par la présence de maisons
fortes et par l'érection de tombes
monumentales et ostentatoires sur les propriétés
familiales, généralement en bord de route et en
situation de visibilité maximale. Ce phénomène
entretient peut-être des relations avec des structures familiales
et sociales particulières : on pense ici, avec la prudence
qu'imposent les stéréotypes que véhicule
ce mot, aux clans. Précisons : il s'agit de la tendance,
dans une société patriarcale, à faire prévaloir
les rapports de solidarité familiale ou de clientèle
sur des comportements plus individualistes. Cette logique de fonctionnement
a, dans le contexte de relation déséquilibrées
entre la société corse et les puissances extérieures
qui dominent la Corse depuis le Moyen-Âge, favorisé
l'émergence de comportements politiques souvent caricaturés
et dénoncés, qu'on peut résumer par une citation
du journaliste Paul Bourde (1887) : "Jadis, ils nous auraient
suivi à la guerre, aujourd'hui ils nous suivent au scrutin".
Les transformations de la société, liées
notamment à l'urbanisation, ont fortement remis en cause
ce modèle d'organisation sociale.
En
contrebas de la maison forte, l'école primaire, avec une
architecture typique de la troisième République.
Accueillant 150 élèves après la seconde guerre
mondiale, l'école a failli fermer en 1987. Il ne restait
que 8 élèves. Un regroupement avec l'école
de Casalabriva a alors permis de sauver l'école. Aujourd'hui,
la classe de Casalabriva (cycle 1 et 2) accueille 23 élèves,
celle de Sollacaro (cycles 2 et 3) 18 : il y a un indiscutable mais
modeste renouveau démographique.
Qui sont ces jeunes actifs dont
les enfants fréquentent l'école ? Pour une bonne
part, il s'agit de gens qui travaillent à Propriano, Sartène
ou Ajaccio, et qui résident à Sollacaro. Ce phénomène
connu sous le nom de "rurbanisation" est constaté
partout en France, depuis une vingtaine d'années.
L'école accueille aussi, pour le deuxième été,
une exposition de peintures : cette manifestation témoigne
des efforts pour revitaliser le village. Elle s'inscrit dans la
lignée des efforts entrepris dans les années 80
par de jeunes corses décidés à sauver leur
village : création d'un foyer rural et d'une association,
l'alivu, qui a créé la foire de Celaccia, très
active pendant une quizaine d'années. C'est le moment d'un
renouveau agricole et artisanal, avec l'installation de quelques
jeunes agriculteurs et éleveurs.
Mais la survie économique de ces petites entreprises se heurte à des obstacles multiples.
Pour en savoir plus, écoutez les interviews
réalisées en 2006.
Une architecture
rurale remarquable.
Les maisons fortes ou torri, se multiplient au XVIème siècle
pour faire face aux attaques barbaresques. Ce sont des maisons
de plan carré, élevées, avec une entrée
surélevées, souvent surmontées d'un piumbatoghju
(sorte de balcon avec mâchicoulis) comme ici à Solacaro.
Au XVIIème et XVIIIème siècle, les maisons
de notables se signalent par leurs appuis de fenêtres
et leurs linteaux décorés.
Quelques plaques apposées dans le village témoignent
des lignes de force de l'histoire et de la vie politique depuis
le XVIIIème siècle :
La plaque rappelant la rencontre
de James Boswell (auteur de "an
account of Corsica") avec Pascal Paoli, chef civil et
militaire de la Corse indépendante de 1755 à 1769.
Célestin Caïtucoli, maire, conseiller général,
député, sous la IIIème république,
témoigne de l'intégration de la Corse à la
République.
La plaque apposée à la mémoire du résistant
Paul Poggionovo, de même que le monument aux morts, rappelle
l'engagement des corses pour défendre la république
française.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Quels rôles jouent les différents
courants politiques, nationalistes corses, gauche, droite ?
Au quotidien, que disent les acteurs,
les responsables locaux, les habitants, du devenir de leur territoire
? Pour cela, nous avons interviewé en 2006 quelques personnes
: Jean-Jacques Bartoli
(directeur de l'école, 1er adjoint au Maire), Dominique
Farelacci (président d ela communauté de communes
du Taravo), Daniel Gallieri
(commerçant), François
Mondoloni (retraité).